Immigrés économiques ou exilés politiques, les poètes portugais de France expriment, qu’ils soient populaires ou érudits, les sentiments et les messages propres de tous ceux qui vivent entre deux rives, entre deux mémoires. Leur voix poétique est l’écho des drames et des espérances de milliers d’hommes et de femmes partis à la recherche d’un avenir meilleur. Publiée initialement dans d’éphémères bulletins ou journaux associatifs, puis diffusée à travers les radios libres ou les radios locales, grâce au dur travail de quelques francs-tireurs agissant hors des circuits politiques et intellectuels reconnus, l’expression poétique portugaise en France tente de gagner une nouvelle “visibilité”.
Dans la présente rubrique, tous les 15 jours environ, nous présenterons un de ces poètes, à travers une brève notice biographique et quelques poèmes.
António Topa
À travers sa poésie, António Topa évoque son propre itinéraire et manifeste ses sentiments, mais en même temps il exprime ceux de milliers d’hommes et de femmes qui se sont opposés à la guerre coloniale en Afrique, ont fui la dictature et la misère à la recherche d’un avenir meilleur et qui vivent aujourd’hui entre deux rives, entre deux mémoires. Sa poésie oscille entre réalisme et lyrisme, dans un langage libre du poids des conventions.
Né en 1948, à Porto, António Topa est issu d’une famille très modeste. Il a vécu son enfance et son adolescence dans une « ilha » (« île »), nom donné aux habitations ouvrières de Porto. Cette période est évoquée dans son recueil de poèmes « O fio da palavra », publié en 1993 par les éditions ACAP 77 (Seine-et-Marne). Regroupés dans une première partie intitulée « Resistência », les poèmes écrits entre 1965 et 1970 contiennent déjà les interrogations et les inquiétudes du poète quant à son avenir, à celui de ses compatriotes et de son pays.
Très tôt il manifeste son opposition au régime politique de son pays et en 1968 il participe au 1er Congrès de l’Opposition Démocratique, à Aveiro. En 1969, il se réfugie en France et sera tour à tour secrétaire-général du Syndicat des Travailleurs Consulaires à l’Étranger, professeur d’éducation spécialisée et interprète, activité qu’il exerce actuellement. En tant que militant politique, il sera candidat au mandat de député sur les listes de l’APU et CDU de l’émigration.
Dans son deuxième recueil, bilingue, « Sur les lèvres du silence/Pelos lábios do silêncio” (éd. Lusophones, Paris, 2000), dominent les thèmes de l’exil, la saudade, l’amour et le sentiment d’être toujours en partance. L’apparente facilité avec laquelle António Topa construit ses vers nous laisse deviner que pour lui la poésie est un lieu d’exil naturel.
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DESCOBRIMENTO DO CAMINHO PARA A EMIGRAÇÃO
Dantes era a Índia
canela cravo oiro
diamantes insinuando
no colo das fidalgas
um brilho
de prata e puta
Hoje
mulher de blusa de chita
saia rota e anónima
mas alta como o silêncio
atravessas a Espanha a pé
carregada de suor sangue
saudade e raiva
como outrora teus irmãos
brancos escravos negros
ontem hoje nem sempre
Outrora do Restelo para o Brasil
armados com a cruz medindo o mundo
mas desarmados de coragem
contando os filhos e as lágrimas
Outrora cruzando raças e sangue
semeando medos e tempestades e
hoje de Monção à Ponta de Sagres
receando homens ventos e marés
parindo filhos para o estrangeiro
Dantes era a Índia orgulho da raça
Hoje descobres Auchwitz em Austelitz
Paris e o boulevard St. Michel
« poboado » de desfigurados artistas
engordando-se de “coltura”
lá pelas “sorvonnes”
ou então em obscuros hotéis
e no “batiment” com “vacanças” pagas
dez contos em moeda portuguesa
Assim encobres o teu destino
descobrindo os seios mirrados
velha puta
(in “O fio da palavra”)
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HISTÓRIAS DA HISTÓRIA
Ontem hoje
quem a história faz
sabe-lhe o amargo gosto
ontem hoje
pedalando pedalando
pesadas bicicletas
de sono e ódio
dos carvalhos para o porto
ontem hoje
às quatro ou
às cinco da manhã
pedalando pedalando
dos carvalhos para o porto
ou de grijó ou de sandim
pedalando pedalando
pesadas bicicletas
de sono e ódio
ou a pé
carregando a vida
e a marmita
carregando o ódio
ontem hoje
pesados comboios
atravessando a espanha
para alimentar
as fábricas da europa
e no metro de paris
carregando um sonho
antigos camponeses ontem
hoje operários apressados
que a indústria
e a europa reclamam
e trituram
(in “O fio da palavra”, excertos)
Immigrés économiques ou exilés politiques, les poètes portugais de France expriment, qu’ils soient populaires ou érudits, les sentiments et les messages propres de tous ceux qui vivent entre deux rives, entre deux mémoires. Leur voix poétique est l’écho des drames et des espérances de milliers d’hommes et de femmes partis à la recherche d’un avenir meilleur. Publiée initialement dans d’éphémères bulletins ou journaux associatifs, puis diffusée à travers les radios libres ou les radios locales, grâce au dur travail de quelques francs-tireurs agissant hors des circuits politiques et intellectuels reconnus, l’expression poétique portugaise en France tente de gagner une nouvelle “visibilité”.